TOUT CE QUE N’EST PAS L’ART-THERAPIE

Publié le par Christelle TADYSZAK

IL NE FAUT PAS CONFONDRE L’ART-THERAPIE AVEC…

La prolifération des pratiques et des formations art-thérapeutiques ont conduit à de nombreux malentendus. Les pages suivantes sont destinées à vous donner quelques définitions croisant le chemin de l’art-thérapie. Elles vous permettront, je l’espère, d’éclairer votre vision de ce qu’est l’art-thérapie fondée sur le modèle tourangeau, enseignée à la Faculté de Médecine de Lille et ainsi prodiguée par ses art-thérapeutes dûment diplômés de cette institution.

L’ART-THERAPIE N’EST PAS DE L’ART…

 

L’art-thérapie se situe dans le registre du soin, elle s’adresse à des personnes en proie à des souffrances et à difficultés. L’art présuppose l'’existence d’adresse, ce qui n’est pas un objectif princeps de l’art-thérapie. (…)  L’art-thérapeute ne cherche pas à faire des on patient un artiste ou faire l’artiste : ce type d’espoir ne saurait exister en art-thérapie.

 

Toutefois l'art-thérapie n'est pas art parce qu'elle ne l'est pas encore... Il faut bien admettre que c'est le spectateur qui donne son statut d'art et d'œuvre d'art à une production. C'est lui qui cautionne (ou pas) la qualité esthétique de celle-ci et par conséquent le statut d'artiste de l'auteur.


Cependant la triade spectateur-œuvre-auteur ne se substitue pas facilement à celle de praticien-production-patient. Le regard émotionnel, sensori-moteur, visuel, tactile, gustatif, olfactif, auditif, culturel porté sur une production s'emplit d'un sens différent selon qu'il s'agit de celui d'un clinicien, d'un artiste, d'un spectateur externe, ou encore d'un critique d'art. L’art-thérapeute va s'attacher à la dynamique de l'œuvre pendant sa conception, sa réalisation et non pas sur le simple et unique résultat final, ou sur une série de productions successives, et sur les difficultés relatives à la personne et à son histoire.

   

L’ART-THERAPIE N’EST PAS UN ENSEIGNEMENT ARTISTIQUE

Même si à divers moments de la pratique, l'injection ponctuelle de techniques et de conseils s'imposent pour aller plus avant dans l'expression créative, l'art-thérapie ne consiste pas à en un apprentissage artistique. Ces apports se doivent d'être parcimonieux et opportuns, sinon la frontière entre l'apport technique bienveillant et l'intrusion risque de provoquer l'agitation chez le patient.

Entre éducation artistique et art-thérapie s'épanchent des affres de différences d'objectifs sous-tendus par une pédagogie, des normes, des techniques et des moyens divers. Fonder une typologie du pédagogue enseignant les arts plastiques, de l'éducateur spécialisé en disciplines artistiques et de l'art-thérapeute qui n'a de sens que dans le rapport à une fonction, une compétence acquise, un lieu d'exercice, une population, et non dans une sacralisation du thérapeutique à même de jaillir de surcroît de toute situation.

Cependant, comment ne pas poser un regard dubitatif sur nombres d'ateliers institutionnels animés par des enseignants ou des artistes non cliniciens attachés dans leur fonctionnement à la technique et à l'esthétique mais qui seront, souvent malgré eux, rangés sous la bannière de l'art-thérapie?...

Que dire des éducateurs et des animateurs socioculturels qui, pris dans le mirage du "tout thérapeutique" négligent leur mission d'origine (pédagogie, socialisation, épanouissement...) à l'adresse de la personne en thérapie?...

Adjoindre l'étiquette thérapie à une pratique d'intention artistique suffit-il pour fonder et engager une démarche psychothérapique? Ce type d'écueil ne témoigne t'il pas d'une confusion des genres et des rôles plongeant littéralement patients et soignants dans un macrocosme d'illusions?

L’ART-THERAPIE N’EST PAS UN ATELIER D'ANIMATION ARTISTIQUE

La fonction de l’artiste intervenant en milieu de soins consiste à partager sa maîtrise d’un savoir-faire artistique, à stimuler l’émotivité par une réflexion esthétique et à donner une valeur ajoutée à la rencontre humaine. Les ateliers d’activité artistique en institution de soins n’ont pas pour autant une nature thérapeutique, du moins directement. Les objectifs de ces ateliers sont avant tout occupationnels ou didactiques.

Si l’artiste met ses compétences au service de l’épanouissement du patient, il ne se substitue en aucun cas au personnel soignant. En effet, un spécialiste du soin est délégué aux ateliers artistiques. Ainsi il observe et évalue les répercussions de l’intervention de l’artiste auprès des personnes en difficulté. Ce qui n’est pas sans se poser la question du qui fait quoi, avec ses conséquences thérapeutiques humaines voire même institutionnelles.

Si les participants aux ateliers peuvent développer leurs capacités artistiques en se rencontrant dans un travail collectif ou individuel et prendre confiance en leurs propres ressources, il est important de ne pas confondre l’activité artistique avec l’activité d’Art-thérapie.  En effet, comme pour la mise à disposition d’une salle de sport dans une structure de soins est bénéfique aux patients en aucun cas la pratique de sport ne se substitue à la kinésithérapie ou la psychomotricité.

L’ART-THERAPIE N’EST PAS UNE THERAPIE VERBALE

Dans une thérapie verbale, la parole occupe le devant de la scène; l'objet créé devient immatériel et relationnel. Tandis qu'en art-thérapie, il s'agit de la production d'un objet palpable et/ou sensoriel inscrit dans un processus dynamique d'expression.

 L’ART-THERAPIE N’EST PAS UNE PSYCHOTHERAPIE A SUPPORT ARTISTIQUE

La psychothérapie à support artistique est essentiellement tournée vers l'expression verbale et mené par un professionnel formé à la psychothérapie. Le support artistique y est ponctuellement utilisé pour débloquer certains processus. L’œuvre produite est alors décryptée, décodée en tant que recueil des symptômes.

La spécificité de l’Art-thérapie repose sur la nature même de l’Art, l’expression. C’est l'ensemble du processus artistique mis en jeu en Art-thérapie qui détermine la théorie de l'art opératoire. L’Art a un pouvoir stimulant, il favorise l’expression des émotions et le principe esthétique s'avère être le moteur de l'art-thérapie.

Par définition sous l'égide de l'esthétique, l’Art-thérapie permet à la personne d'adopter une attitude active tout au long de l’activité artistique. Une topologie adaptée permet d'exploiter le phénomène artistique dans l'objectif de la prise en charge thérapeutique et humanitaire d'une personne.

L’art-thérapeute n’est pas un psychothérapeute, il n’interprète pas les productions des personnes et ce qui est verbalisé n’est pas récupéré. Il s’attache à exploiter les facultés physiques, psychiques et relationnelles disponibles à travers des émotions esthétiques exprimées. Sa mission est de donner des moyens de s’exprimer au-delà des mots.

L’ART-THERAPIE N’EST PAS DE L’ERGOTHERAPIE

Depuis une quinzaine d'années, l’ergothérapie n'est plus l'apanage de la psychiatrie, mais plutôt celui de la neurologie, de la traumatologie, de la pneumologie ou encore de la gastro-entérologie. Le passage de la rééducation des fonctions mentales à la rééducation fonctionnelle s'avère consommé.

 

Malgré leurs liens, ergothérapie et art-thérapie sont deux pratiques qui ne se superposent pas.

En ergothérapie, la performance matérielle, l'habileté, l'esthétique, etc., soit la jouissance immédiate, battent la mesure dans une discipline artisanale contrôlée dans une subordination socio-thérapeutique. L’ergothérapie utilise ainsi des activités physiques, manuelles comme moyen de réadaptation sociale.

En art-thérapie, la production chemine dans une liberté projective excluant partiellement la quête esthétique, la performance et l'espérance de gains.

 

Lorsque ces deux pratiques coexistent dans une même institution, les acquis ergothérapiques se traduisent directement dans les tenants d'art-thérapie par une extension de la gamme d'habiletés. Quelque soit la médiation considérée, le corps est le dénominateur commun de base.

 

L’ART-THERAPIE N’EST PAS NON PLUS UNE EDUCATION-REEDUCATION PSYCHOMOTRICE

Il s’agit avec la rééducation psychomotrice de rééquilibrer les rapports entre soi et son corps quand il existe des troubles des fonctions mécaniques sans support organique. Il apparaît alors parfois nécessaire d'opter pour un passage par des techniques instrumentales de psychomotricité. Car peindre, sculpter, coller, écrire, danser, chanter... sont la concrétisation d'actes moteurs et perceptifs impliquant un savoir-faire du corps reconnu par l'autre (donc éventuellement reproductible).

L'activité motrice dynamisant la mémoire motrice, cognitive et affective restitue à la personne en thérapie parfois une certaine osmose entre son corps physique et son corps psychique mal exploré jusqu'alors.

Si l'art-thérapie ne peut pas se ramener à un ensemble d'exercices, de techniques et de méthodes, elle ne doit pas les ignorer, même si leurs utilisations relèvent du cas par cas dans un dosage qui tient toujours de la présence juste.

ET TANT D’AUTRES…

UN ATELIER DE DEVELOPPEMENT PERSONNEL où les participants sont autonomes, en recherche d'approfondissement de la connaissance de soi et peuvent selon les propositions de l'animateur utiliser un support artistique pour se mettre en situation et utiliser l'introspection.

UN ATELIER D'EXPRESSION ARTISTIQUE où les effets expressifs de l'art sont accueillis sans être évalués ou utilisés dans un accompagnement thérapeutique.

UN ATELIER DE RELAXATION où l'objectif général est de faire lâcher les tensions associées ou non à une pathologie.

Publié dans Généralités

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